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Avant-hier j'ai fait de la cuisine avec Pierre. Ma première expérience de test culinaire en binôme.
(Un affectueux merci à mon frère Christophe, déjà évoqué sous le nom de Stol, qui est lui-même très doué pour la cuisine et qui m'a permis de connaître Pierre.)
Il était convenu que Pierre irait au marché mercredi matin et choisirait les ingrédients pour qu'on prépare ensemble sa dernière création culinaire — qui fera l'objet d'un compte-rendu ultérieur, car elle vaut vraiment le détour, tant pour la saveur que pour la quantité impressionnante de vaisselle sale, d'énergie électrique et d'épluchures qu'elle implique.
Mais en plus, mon co-testeur avait glissé plein d'autres choses dans son panier.:
— certains ingrédients dont on avait parlé récemment (en fait, on n'a pas réussi à faire tous nos tests en un seul après-midi et c'est tant mieux car j'ai vraiment envie de recommencer, on a bien rigolé et ça m'a redonné de superbes envies de culinotests),
— oserai-je vous le dire... une délicieuse bouteille de Puligny-Montrachet, que nous avons débouchée vers 17 heures à une heure que nous qualifierons de raisonnable, afin d'apprivoiser nos gosiers en vue de la dégustation à venir,
— et, en ultime bonus, un objet tellement génial que je vous fais un billet dessus avant d'attaquer les choses sérieuses.
L'objet en question vient tout droit d'un marché de Rome.:
Pierre l'a acheté à un quincaillier bonimenteur — qui parlait italien, certes, mais lui a fait une démonstration gestuelle parfaitement convaincante.
Vous voyez ce que c'est.?
Ça sert à faire des spirales de légume. C'est vraiment le genre de truc que j'adore.
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[EDIT] Plusieurs personnes m'ont demandé de l'aide pour trouver en France cet ustensile ou son équivalent.
Sachez qu'il est disponible sur Internet, pour 3,50 € (prix début 2008) : Tige-déco pour la réalisation de serpentin, torsade en légumes (carottes, concombre...)
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Pierre m'a raconté qu'en deux secondes, sous ses yeux, le bonhomme du marché romain avait fait un trou dans une patate avec cet engin pour en extraire des spirales (exactement selon le principe du vide-pomme) avant de glisser une carotte dans le conduit (exactement selon le principe de... je me tais, on va encore me traiter d'obsédée). Il avait tranché la patate ensuite.: cela donnait des rondelles de pomme de terre farcies à la carotte. Décoratif, non.?
Pierre a été emballé, et je dois dire que moi aussi, quand j'ai vu l'objet et que je nous ai imaginés en train de faire des frites en spirale.
J'ai sorti ma friteuse — malencontreusement remplie d'une huile périmée depuis octobre.2004, comme je m'en suis rendu compte en consultant l'étiquette des bouteilles que je venais d'y verser.
Zut, pas de mode d'emploi dans la petite boîte ni sur l'emballage. Même en italien, ça nous aurait aidés.
J'ai filé une patate à Pierre. Une énorme "Agata" de 450.g, mine de rien. C'est une pomme de terre assez dense et dure, tout en étant assez juteuse. Selon les sites que j'ai consultés, c'est une variété "spéciale frites" ou qui "ne convient pas pour les frites", comme ça les choses sont claires et tout le monde est content.
Pendant que Pierre s'occupait de la patate, je m'occupais de l'appareil photo.
Pierre a planté le truc au sommet de la patate. Pas très facile à première vue, car les deux cercles ne sont pas franchement aiguisés. Assez physique donc.: un boulot de perceuse électrique plus qu'un boulot d'homme.
Mais bon, Pierre a courageusement opéré un perçage mécanique, en tournant, tournant, tournant. Ça faisait "scratch, scratch, scratch" au centre de la patate. Il m'a semblé qu'après un début de pénétration difficile, ça se vrillait plus facilement.
Après m'être un instant demandé si la patate n'était pas trop longue pour l'ustensile, miracle.: la chose est sortie de l'autre côté.! Mais il était temps car on arrivait à la butée.
Pierre a essayé de retirer dans l'autre sens, comme on le fait avec un vide-pomme.
La patate n'a pas voulu venir mais le manche lui est resté dans la main.:
On s'est donc retrouvés avec une tige d'un côté, une pointe de l'autre et une patate au milieu. Bonne chance.!
Pierre a alors décidé de pratiquer une césarienne.
Admirez cette découpe précise, et la beauté cylindrique de notre production.:
On prélève notre serpentin.
Bon, évidemment, il y a un peu de chute, mais la chute est jolie aussi.:
Euh, et maintenant on fait quoi.? Car ce n'est pas un serpentin qu'on a là, mais deux serpentins étroitement entortillés l'un dans l'autre.
Pierre essaie de les démêler par un des deux bouts.: "Aïe, non, ça va casser", me dit-il.
On comprend alors que la force ne nous sera d'aucun secours, et que sans la moindre notice explicative nous n'y arriverons que par une réflexion méthodique.
Pierre se met alors à pleurer.: "Eh mais je ne suis pas mathématicien moi.!"
A mon tour, je fonds en larmes.: "Ouiiiiin, moi non plus.!"
Nous hoquetons au-dessus de la patate et inondons la cuisine de nos sanglots.
(A bien me rappeler, je ne suis plus sûre que nous nous soyons livrés à de tels épanchements émotionnels, mais avouez que sans larmes le récit est tout de suite plus plat).
Puis, au moment où j'allais lacérer mes vêtements sous l'emprise du désespoir, Pierre a trouvé le bon geste et les serpentins se sont séparés en un quart de seconde.:
En fait, il fallait les dérouler en sens inverse, chacun s'éloignant au fur et à mesure en directions diamétralement opposées.: ils se séparent de façon horizontale, si vous voulez. J'ai dû me résoudre à conserver mon intégrité vestimentaire et me suis donc consolée en inspectant ces intéressantes petites choses.:
C'est mignon. Très mignon.
L'huile est chaude.: parfait, il n'y a plus qu'à procéder.
Plaaf, Pierre les jette dans la friteuse, ainsi que deux ou trois frites à bordure côtelée qu'il a découpées avec un autre gadget italien.:
On a cinq frites qui se courent après dans deux litres d'huile bouillante, mais comme on ne les a pas épongées, ça fait plein de bruit et plein de bulles.
Et voici le résultat.:
Très joli, sauf que l'huile était super chaude lors du premier bain, ce qui fait que tout était archi cuit en deux minutes.: un second bain aurait certes été nécessaire pour affermir le croustillant, mais il aurait donné des serpentins d'ébène.
Trente secondes plus tard, alors que j'hésitais à grignoter ces trucs frits dans l'huile périmée (j'étais un peu malade depuis la veille à cause de mon nouveau régime "sashimi 24.h/24"), Pierre me tend un serpentin en faisant la grimace.: "Pfff, c'est devenu tout mou, oh là là regarde-moi ça... pffff, on dirait de la vieille fesse.!"
Je me suis détournée un instant pour photographier le contenu du four (vu qu'on avait trois ou quatre tests lancés à la fois) en contractant de toutes mes forces la musculature de mon avenant postérieur.
Puis j'ai croqué une extrémité de serpentin un peu plus croustillante que le reste, en tentant d'oublier le goût de rance de l'huile.
Potentiellement sympathique, je dirais.
"Potentiellement" seulement, mais je vous assure que le potentiel est là.
Pierre de son côté a refait la moue en goûtant.
En fait, ç'aurait été parfait.:
1) si cela avait eu bon goût (pour ça il aurait suffi d'avoir de l'huile correcte et de saler nos serpentins),
2) si cela avait été plus croustillant (pour ça il aurait suffi de les plonger dans de l'huile moins chaude la première fois, pour se réserver la possibilité d'un second bain).
Je me disais aussi qu'on aurait plus de relief sur la langue si les spirales avaient des arêtes, et pour ça il suffirait que les cercles soient en fait des triangles, ce qui nous aurait permis d'obtenir des spirales triangulaires plutôt que rondes. Mais la forme ronde doit être vraiment très bien pour la cuisson à l'eau.
On doit aussi pouvoir rationaliser l'utilisation du légume pour avoir plus de serpentins et moins de chutes. Mais à mon avis, pour ça, il faut un peu de pratique.
C'est drôle, j'ai toujours rêvé de m'acheter une mallette d'ustensiles de déco mais je n'ai jamais osé. Je rêve souvent de faire de la cuisine cucul pour buffets tartignoles. Cet engin a ravivé mon désir. Peut-être que je devrais y penser pour Noël.?... ;-)
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Bel achat : solide, économique : 1 frite par personne... Une de mes résolutions est de rire, là j'ai éclaté de RI - RE!