Thème cliquable : apéritif (à boire) - astuces santé-minceur - vins
Hier, après le déjeuner, je suis allée prendre un café avec une copine dans un bistrot du quartier. Comme on était en forme, on a pris un kir à la place du café.
Cela faisait des années et des années que je n'avais pas bu de kir. Ça remonte à la période où j'étais étudiante, autant dire au XIXe.siècle.
Le kir c'est comme les huîtres.: quand ça vous a rendu malade une bonne fois, on n'y touche plus pendant un bon moment… Et on fait bien à mon avis, car j'ai constaté hier qu'un seul kir suffisait à me faire tourner la tête, et même à me terrasser à retardement (je me suis surprise à émerger d'une sieste indue vers 19.h.30). Mais il faut dire que c'était un kir de bistrot, et les kirs de bistrot, on dira ce qu'on veut mais ça reste du kir de bistrot.: un ballon de boisson bas de gamme, voire toxique. Dommage… car je ne vois toujours pas ce qui empêche les établissements même très ordinaires de proposer à leur carte un kir avec une très bonne crème de cassis ou de framboise, et surtout avec un très bon vin blanc.
Hier je n'ai pas aimé le goût trop sucré du kir, mais surtout, dès la première gorgée, d'horribles sensations me sont revenues d'un seul coup, comme une claque dans la figure. Le kir est véritablement ma madeleine de Proust, sauf que les souvenirs qu'il me rappelle n'ont rien de glorieux.
Ah le kir.!… J’ai vraiment adoré ça. Comme quoi, les goûts changent.
Dans ma jeunesse j'adorais le goût du sucre, et j'adorais la couleur du kir, que je trouvais festive et excitante, surtout le matin, à l'heure où sécher les cours pour aller boire de l'alcool au bar du coin est particulièrement stigmatisant au sein de la communauté. Boire avant l'heure, boire avant tout le monde, ça renforçait encore mon plaisir, ainsi que celui de mes trois camarades de boisson.: on était fiers, jeunes et encore beaux.
On ne faisait quand même pas ça tous les jours, juste de temps en temps.: avec Emmanuel, Vincent et Bénédicte, on s’enfilait trois ou quatre kirs en suivant. On s’arrêtait quand on avait épuisé tout l'argent prévu pour nos sandwiches et nos menues dépenses. Bénédicte rotait comme jamais je n’ai vu roter une fille, on rigolait, et après, tout d’un coup, les murs se mettaient à tourner.
Traître, le kir, atrocement traître. Mais bien plus traître au café que chez vos amis, et c'est ce que j'entends dénoncer haut et fort aujourd'hui. De fait c’est ce qui m’en a dégoûtée, au point que la période kir n’a pas duré longtemps.: elle s’est achevée un matin où on séchait des cours importants. Comme on avait mauvaise conscience, on était allés se réconforter au comptoir.
Bizarrement, alors que nous n’étions que quatre et que nous n’avions, me semble-t-il, payé qu’une tournée chacun, j’achevais mon sixième kir quand on a fini par se séparer pour aller en bibliothèque préparer nos cours du lendemain.
Je ne sais même plus comment j’ai atterri dans les chiottes du premier étage. Malade à crever, agrippée des deux mains au bord de la cuvette pour éviter la chute, je me balançais dans tous les sens comme un ajonc remué par la bourrasque. Dans la terreur de me retrouver à genoux sur le sol dégoûtant.
Ça ne venait pas, bien que je sois en prise directe avec la puanteur qui montait du trou. Le plus pénible : alors que je tournoyais en plein vertige éthylique, ma lucidité suraiguë me faisait enregistrer chaque détail du balai de chiottes, du petit dépotoir à serviettes hygiéniques, des reliefs abandonnés sur le carrelage humide par les usagers précédents. Minable, minable, ce mot me tournait dans la tête, je ressentais ma déchéance dans toute sa splendeur.
Heureusement que j’avais fermé le verrou. Un seul wc pour les cent étudiants de la salle contiguë me valait une entrée fracassante toutes les trente secondes. Et toujours le même manège.: l’importun faisait violemment irruption dans l’avant-chiottes équipé d’un lavabo puis secouait avec sauvagerie la poignée de ma porte. Constatant qu’elle était close, il soupirait bruyamment et se postait là en attendant que l’occupant ait fini sa petite affaire (ce qui est le comble de l’indélicatesse, il faudrait quand même l’apprendre aux jeunes.!).
De l’autre côté du battant aussi épais qu’un papier journal, je me tétanisais en statue de sel jusqu’à ce que la personne, découragée, ressorte pour se mettre en quête d’autres chiottes. Alors, l’échine affaissée, rongée par le malaise, j’essayais de vomir jusqu’à l’arrivée du prochain fâcheux.
Au bout d’un temps infini, «.maison… oh maison par pitié.» s’est imprimé dans ma tête. J’ai renoncé à vomir et je suis sortie, la tête baissée sous le poids de la honte, notant au passage que je ne distinguais plus mes chaussures. J’ai rencontré un ami dans la rue, du moins c’est ainsi qu’il s’est présenté car pour ma part j’aurais été incapable de reconnaître ma mère. «.Mon bus, mon bus.», ai-je bêlé lamentablement en direction de la tache rose qui devait être son visage. L’ami m’a alors emmenée à l’arrêt du bus (c’était le bon, ce qui prouve bien que c’était un ami qui me connaissait assez pour savoir que je prenais le 63). Le trottoir se confondant avec le ciel, inutile de dire que j’ai eu besoin d’aide pour trouver les marches du bus, et encore plus pour les monter. «.Ça ira.?.» m’a demandé mon ami en faisant voir ma carte orange au chauffeur. J’ai fermé les yeux.: «.Oh non, ça m’étonnerait !.» était trop long à dire, alors j’ai geint un «.ouinnn….» en guise de merci.
Le trajet en bus a été homérique.: à chaque secousse, mes yeux descendaient dans mon estomac tandis que mon cœur me sautait aux lèvres, en un ressac annonciateur de raz-de-marée. Je profitais des redémarrages brutaux pour me laisser entraîner, de trébuchements en glissades, vers l’arrière du bus, où je savais que se trouvait la sortie. Ma dérive agonisante m’a finalement permis d’échouer à ses abords, où je me suis rattrapée de justesse à un montant alors que j’allais culbuter sur les genoux d’une personne assise en fauteuil roulant. «.Oh pardon, pardon….» n’a pu franchir mes lèvres, mais mon regard de naufragée a dû l'exprimer. Quelqu’un m’a regardée, une femme je crois, avec l’air de s’inquiéter pour moi. Elle avait raison. Tout d’un coup j’ai senti que ça venait. Pas la peine de songer à demander l’arrêt ou tirer le signal d’alarme, je ne voyais plus rien, n’entendais plus, attendais juste l’inévitable désastre.
Mais le dieu des poivrots, pour une fois, s’est souvenu de sa brebis. Une seconde avant le moment fatal, le miracle eut lieu.: il y eut un arrêt (ce n’était pas le mien, mais pouvais-je faire la difficile.?) et la porte s’est ouverte devant moi. Happée par l’extérieur, je me suis retrouvée sur la chaussée avant d’avoir fait ouf, tel Zorro descendant de son cheval.: ni en marchant ni en tombant, les genoux mous et élastiques, dans un mouvement aquatique… qui m’a menée sans à-coup jusqu’au caniveau. Là, bouche au ras du sol, j’ai vomi tout mon saoul (c’est le cas de le dire). Un regain de lucidité m’a alors fait percevoir un troupeau d’enfants qui cheminait bruyamment à deux pas de moi, escorté d’accompagnatrices.:
"Dis Anne-Thérèse, qu’est-ce qu’elle fait, la dame.?" a demandé une voix fluette.
"La dame ? Mais je n’ai que dix-neuf ans.!" me suis-je étonnée in petto, juste avant d’avoir un nouveau spasme, d’une violence inouïe et dont le résultat, vu que je n’avais rien mangé depuis la veille, était parfaitement dénonciateur.
"Ben ça, pour être malade… oh là là, elle est malade.!" a seulement dit Anne-Thérèse, discrète.
Après cela, le vomi m’ayant fait du bien, j’ai réussi à regagner le domicile parental, où, après divers déboires avec la serrure qui me fatiguent rien que d’y repenser, j’ai enfin pu m’effondrer sur le premier lit venu.
Tout ça pour dire qu’après, je n’ai plus pu voir le kir en peinture. Je me suis alors fixé une nouvelle règle de vie.: jamais de liqueur ou de crème dans le vin quel qu'il soit, et jamais d’alcool avant midi.
Mais surtout, si quelqu'un a l'envie d'initier une pétition en faveur du kir de qualité supérieure dans les bistrots de quartier, je suis disposée à la signer et même à militer activement, non plus pour mon propre bénéfice car on ne m'y reprendra plus, mais pour les nombreux amateurs de kir qui au moment même où je vous parle se ruinent la santé dans tous les cafés de France et de Navarre.
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À lire en ce moment :Le kir qui tue !Quand donc les bistrots se décideront-ils à faire du kir de bonne qualité ?Commentaires
Re: oh là là !!
par Caroline
le Mercredi 27/04/2005 à 15:29
Hi hi hi ! Ah oui, pitié, pas avec la brandade !
par Estelle
le Mercredi 27/04/2005 à 18:38
On voit que deja a l'epoque, tu aimais les culino-tests : combien de kirs faut-il engloutir avant de se rendre malade ? Tu as fini par trouver ;-) Je crois que j'aurais trouve ca super drole si ca n'etait pas a toi que c'etait arrive ! Et sinon, je suis rassuree de savoir que tu t'es renconvertie dans la brandade, c'est quand meme moins dangereux tout ca. Gros bisous !
Re:
par Caroline
le Jeudi 28/04/2005 à 12:32
Estelle mais voyons tu as raison ! Bien sûr que c'est ma vocation de testeuse qui était déjà en action à cette époque… C'est tout simplement admirable, à un si jeune âge. Pffff, et quand je pense que je mettais cet épisode sur le compte d'un manque de moralité et de tenue !
par Mijo
le Jeudi 28/04/2005 à 12:56
Tu as raison, battons-nous pour un vin blanc de meilleure qualité dans les bistrots. J'ai une expérience similaire (sauf le final !!). Avec 4 amies internes au lycée, on escaladait la grille du lycée pour aller boire un petit blanc limé au bistrot du coin. C'était infect car on nous servait un vrai tord-boyau en guise de vin blanc. Nous n'avons pas poussé l'expérience véritablement à fond car cette même grille donnait sur un carrefour avec feu-rouge. Les automobilistes avaient largement le temps de nous voir escalader la grille. Une plainte a été déposée et un jour, plusieurs têtes (proviseur, surveillants...) ont surgi des fourrés près des grilles... Je
par Mijo
le Jeudi 28/04/2005 à 12:59
Zut... tout le monde vient de remarquer que j'étais encore entrain de me taper un p'tit blanc limé et que sous son effet dévastateur, mes doigts ont ripé sur le clavier. Le pire, c'est que je ne me souviens plus de ce que je voulais écrire.
Quand feront ils de bons kirs ? Jamais, quoique...
par Patrick
le Lundi 02/05/2005 à 00:53
Le kir, c'est de la crême de cassis, ou mieux de la double crême de cassis ou encore mieux de la crême de cassis primeur et de l'ALIGOTE. Tout autre vin dans le kir est une hérésie. Et puis que ferait on de l'Aligoté, cépage blanc qui donne des vins secs, sans charme, un peu rêches, mais qui s'adoucissent comme par miracle au contact du cassis pour en faire une boisson très sympa (pas vraiment un apéritif parce que les papilles se remettent juste après le fromage, donc autant manger le dessert de suite.) Evidemment tous les aligotés ne sont pas très bons, mais tu peux limiter les risques au bistrot en précisant un kir à l'aligoté. Pour le bistrotier moyen, ça sent le contrôle de la Direction de la Répression des Fraudes et il ne prendra normalement pas le risque de le faire avec un blanc en cubi. Au pire il dira qu'il n'a pas d'Aligoté, au mieux, même si ce n'est pas génial, tu risqueras moins de te donner en spectacle aux enfants des écoles et d'être contacté par l'autre niaise pour participer à "je bois du mauvais kir et je le gerbe, c'est mon choix!" Avec Ségolène, nous aimons bien de temps à autre un communard, la version rouge du kir, avec une double crême de cassis et un Beaujolais du Domaine des Tourniers, garanti sans chaptalisation, sans levurage, sans acidification et sans sulfitage (ou presque). Au quatrième, on chante l'Internationale en breton, mais on se réveille frais comme des gardons, et pas pêchés de l'avant veille. Quant au blanc limé, je t'en apporte un exceptionnel fait par Jean Paul Lafragette à ma prochaine visite parisienne. Ou plutôt une caisse de 12, parce qu'à 7 % Vol., avant qu'on soit torchés il va falloir s'en occuper.
par Métuelle
le Jeudi 05/05/2005 à 19:39
Pour pratiquer régulièrement le kir-qui-fait-vivre plutôt que le kir-qui-tue, j'avoue que je le supporte aussi bien avec de la crème de griotte que de mûre, de framboise ou de cassis mais le secret, c'est de le boire ailleurs qu'au bistro, de préférence le soir avec des gens qu'on aime, un petit Sauvignon, un aligoté en effet, voire un bon chablis si on est en fonds, et surtout de verser très peu de liqueur, sinon c'est trop sucré et ça écoeure avant le 2ème verre ! Ce serait dommage, vous êtes d'accord avec moi ? Cela dit, chère Caroline, tu as vraiment vécu une jeunesse tourmentée ! Je tremble en pensant à ta honte si tu avais vomi dans le bus ! Dans ce cas-là, qui nettoie ??? Bizoooos !
hygiène de vie
par Virginie
le Mercredi 25/05/2005 à 21:12
Miam, tu es fabuleuse! J'ai beaucoup ri en lisant ton billet, et me suis souvenue de mes nombreuses cuites d'adolescence. Selon moi, une cuite se prépare de manière presque sportive. Non pas qu'il faille un entraînement à la boisson, bien au contraire, car l'organisme s'épuise, et l'ivresse est plus difficile à trouver. Donc le truc, c'est une sorte d'hygiène de vie, manger sain, pas d'alcool en semaine, ou juste un petit verre de rouge au repas de temps en temps, bien dormir, faire un peu de sport, ou du moins, remuer sa couenne, et une bonne petite cuite de temps en temps, mais pas régulièrement, sinon le corps s'adapte et n'est même plus surpris. A propos de kir, j'aime moi aussi beaucoup le communard (on dit aussi cardinal par chez moi, ça fait plus classe).
Re: hygiène de vie
par Jérôme
le Mardi 26/07/2005 à 18:53
C'est etrange , en te lisant , je me souviens de mes années de soulaugraphes d'etudiant , à absorber , ingurgiter , à siphoner un nombre non relatif ( l'anti vinasse negative n'existant à ce jour pas ) de bouteille de "blanc pêche". Ah l'affreuse boutanche : un vrai litre de professionel du jaja : Une BLD ( Brasserie Lorraine Distribution ) en verre blanc gravé de sept etoiles pres du goulot ( plus decorée que la casquette d'un chef de gare ...) auquelle le taulier rajouté un sirop de pêche aux aromes naturels resultant d'une des labos de recherche de BP Chemicals ou Hoecht... Combien de fois , la pharmacienne s'est marré en me voyant les samedi matin venir chercher.....de la CITRATE DE BETAINE , la vrai , la salvatrice !... lorsque l'Alka Seltzer ne pouvait plus rien... Jérôme.
Et aussi une pétition pour un thé de qualité
par Malita
le Lundi 17/10/2005 à 18:21
Comment font la plupart des bistros et pire les salons de thé pour oser nous servir comme breuvage, des sachets remplis de poussière de thé d'une marque que je nommerai pas mais que vous devinerez car elle doit avoir une sorte de monopole. Alors qu'il existe même en sachet d'excellents thés et la moindre des chose pour une boisson qui n'exige meme pas de percolateur serait de nous proposer du thé feuille.
le kir
par dingo
le Mercredi 08/02/2006 à 13:15
t'inquiète...les bitures c'est la honte mais en général ca ne tue pas....il faut se méfier des alcools sucrés très traitres et cela peut importe leur qualité et dès qu'ils sont ingérés en grande quantité ils rendent malades dès qu'on prend l'air et meme très malades beaucoup plus qu'avec d'autres boissons
Merci !
par Fincasor Twillartee
le Jeudi 30/03/2006 à 12:22
Oh oui, mille mercis MIAM pour le bon fou-rire que je viens de prendre en lisant ton article.
par Eleonora
le Mardi 03/06/2008 à 11:48
Oh là là, m'est arrivé quelquechose de similaire il y a quelques semaines, mais après trois kirs seulement... C'est vrai qu'on se fait avoir, assis tout va bien, mais quand on se lève... |
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Ma pauvre Miam ! As-tu remarqué comme ça fait du bien de tourner à la rigolade tous nos petits maux ? (Je te passe les détails de ce qui me passe par la tête à chaque fois que je vois la pub Absolut, je crois que tu as suffisamment bien dressé le tableau ;-) ).
Dans mon resto futur (qui sait, peut-être verra-t-il vraiment le jour celui la ?) je te promets un vrai kir. Car c'est vrai que ça peut être bon, un kir !
Par contre, on évite avec la brandade hein !
A bientôt,
Fred